On a testé pour vous : la fête de la musique !

Ah qu’est-ce qu’on le kiff ce jour là. La fête de la musique a une saveur particulière. Pas de quoi se faire un monde, mais il y a quand même ce truc qui nous tient. Comme une sensation que tu ne retrouves pas souvent dans la plupart des villes françaises. Ce « truc » c’est pas seulement notre rapport à la musique, on en joue, on en écoute, mais comme beaucoup au final. Ce n’est pas non plus le solstice d’été, d’ailleurs on n’en a pas encore vu la couleur.

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C’est rien de tout ça, c’est plutôt la démonstration de la capacité créatrice de la population. Et ça, ça vaut de l’or. Mais c’est aussi un point d’étape : une évolution des goûts et des couleurs, de ce qui fait hocher les têtes aujourd’hui et pourquoi ?

Identité musicale

On est une génération bercée par la musique. Comme d’autres sûrement. Après les tourne-disques ou les radio-pirates, on a eu nos walkmans increvables, nos CD rayés gravés à la chaîne pour les potes et nos radio-libres qui rendaient les premières heures de cours difficiles à suivre.m1

Si j’ai eu une crise d’ado, elle a plutôt été musicale. J’ai rêvé au son des poum poum tchak, des vieux rap français et américains de la fin des années 90. Ils ont laissé place aux guitares électriques hyper saturées, aux baggys et sweats noirs avant que les rythmes folk, reggae et jazz viennent compléter le tableau chaotique pour ma 18e année. La Fac m’a lissé à tous les niveaux. Sauf politique peut-être. On apprend à bien s’exprimer, on échange les cultures, on oublie un peu d’où on vient, parfois. Arrivé à Paris le mélange bobo propret de la Sorbonne m’a définitivement vacciné. J’ai fait un retour rapide à mes premiers amours. Les Iam, NTM et autres, brandis comme une provocation à ce que je sentais ne pas être mon monde.

Bref, la musique ça a quelque-chose de notre identité. Ça dit beaucoup d’une génération : ses valeurs, son vécu, ses peurs et ses rêves ; sa diversité aussi. Elle peut être bourgeoise et conforme, hypocrite et haineuse. Elle peut être populaire et subversive, puissante et révolutionnaire.

Création et subversion

La musique a une portée  universelle. C’est ce qui rend le 21 juin si particulier. Ce jour anime tout le monde autour de cette part de soi, il la fête et il permet à chacun de s’assumer avec, y m3compris en tant que créateur. Car c’est là toute la majesté de la culture. Le réveil de la capacité créatrice. C’est le plus beau de tous les trésors car ce qu’il révèle c’est l’essence de la nature humaine qu’on réduit trop facilement aux tristes périodes de notre histoire ou la cupidité d’une poignée d’enfoirés. Elle est subversive par nature car elle vient d’en bas, elle structure, elle bouscule, comme une cocotte minute prête à exploser. Elle est belle parce qu’elle fait peur, on cherche à la contrôler, à l’enfermer dans un recoin minuscule comme on met en bout de table l’invité qui n’était pas vraiment.

D’une certaine manière, ce jour là elle se déculpabilise. C’est comme son anniversaire. C’est sa fête à elle car à côté des grandes scènes où on voit toujours ceux qu’on entend tous les jours à la radio, il y a ce gamin qui fait son premier concert devant ses potes et ses parents. Il y a ce groupe de punk qui joue devant les mamies du village. Il y a ces ami-e-s au coin d’une rue, devant un restau, ou une église, qui cherchent les pièces qui seront écoulées en bières quelques heures plus tard.

Besoin d’humanité

Mais je sens la musique subversive quand elle est humaine. Elle est humaine quand elle est imparfaite et unique. Elle a de l’âme car chaque musicien gratte son instrument différemment, emboîte le temps à sa manière, lance sa voix depuis le plus profond de ses tripes. Tout musicien à sa patte, le taux de souffle utilisé dans une trompette, lam5 puissance du touché sur le piano, l’émotion inimaginable qui passe dans une voix, l’infinité de nuance dans un étouffement de corde. C’est la place exacte des doigts dans un instrument sans frète, la bosse sur une caisse de résonance, le travail du temps sur le bois,…

Parfois ça déraille, la note est fausse, ou ce n’était pas celle qu’on attendait. Parfois elle vient toute seule, dans ce moment où la musique est allée plus vite que le cerveau. Surtout, il faut la laisser prendre le dessus. Elle est magnifique quand elle est brute comme le roc plus que lisse comme le marbre.

Seulement voilà, ce 21 juin, plus de boum boum électro sans saveur que de petites perles sorties de nulle-part. Les titres s’enchaînent et sont réguliers comme des métronomes, rien ne dépasse, rien ne transpire. C’est dansant, mais la perfection robotique me traverse comme un spectre sans m’arracher la moindre sensas’.

Je ne veux pas que mon analyse soit un jugement mais je ne peux m’empêcher d’avoir un malaise. C’est peut-être celui du vieux con qu’il y a en chacun de nous, ou celui de quelqu’un qui a peur qu’on perde, partout, de notre humanité.

On a testé pour vous, la fête. De la musique ?

Romain JAMMES

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2 réflexions sur “On a testé pour vous : la fête de la musique !

  1. lien vers http://www.dailymotion.com/video/xl0lyn_hocine-le-combat-d-une-vie_news
    En 1975, quatre hommes cagoulés et armés pénètrent dans la mairie de Saint Laurent des arbres, dans le département du Gard. Sous la menace de tout faire sauter à la dynamite, ils obtiennent après 24 heures de négociations la dissolution du camp de harkis proche du village. A l’époque, depuis 13 ans, ce camp de Saint Maurice l’Ardoise, ceinturé de barbelés et de miradors, accueillait 1200 harkis et leurs familles. Une discipline militaire, des conditions hygiéniques minimales, violence et répression, 40 malades mentaux qui errent désoeuvrés et l’ isolement total de la société française. Sur les quatre membres du commando anonyme des cagoulés, un seul aujourd’hui se décide à parler.

    35 ans après Hocine raconte comment il a risqué sa vie pour faire raser le camp de la honte. Nous sommes retournés avec lui sur les lieux, ce 14 juillet 2011. Anne Gromaire, Jean-Claude Honnorat.

    Sur radio-alpes.net – Audio -France-Algérie : Le combat de ma vie (2012-03-26 17:55:13) – Ecoutez: Hocine Louanchi joint au téléphone…émotions et voile de censure levé ! Les Accords d’Evian n’effacent pas le passé, mais l’avenir pourra apaiser les blessures. (H.Louanchi)

    Interview du 26 mars 2012 sur radio-alpes.net

  2. Certains grands compositeurs n’étaient pas forcément des gens du peuple faisant de la musique populaire subversive. Prenons Bach par exemple.
    Mais il est vrai qu’une musique subversive et révolutionnaire, surtout par rapport aux codes déjà prescrits dans la matière, est parfois une grande oeuvre.

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